Un bouleversement discret mais massif: l’arrivée des résumés IA sur Google Discover
Le 16 juillet 2025 marque un basculement silencieux mais colossal dans l’accès à l’actualité IA: Google a activé pour des millions d’utilisateurs à l’international les résumés générés par intelligence artificielle en haut du flux Discover. Si cette fonctionnalité, testée à petite échelle depuis plusieurs mois (source BDM), suscitait la curiosité, son déploiement à l’ensemble des utilisateurs tétanise désormais la sphère médiatique et numérique. Les articles sont désormais précédés d’un encart synthétisant, en quelques lignes, les points essentiels du sujet, générés en temps réel par l’IA de Google, notamment le modèle Gemini. À la clé: un service ultra-rapide, personnalisé et multilingue, opéré via prompts et modèles de langage LLM (Large Language Models), avec adaptation contextuelle selon les thèmes et les actualités récentes.
Si ce progrès technologique impressionne en matière de modélisation du langage, des questions demeurent: fiabilité des résumés, transparence des sources, respect des angles éditoriaux, gestion des contenus sensibles et diversité des opinions. Les premières limites techniques (résumés trop approximatifs, parfois biaisés ou tronqués) ont d’ores et déjà été signalées dans plusieurs pays (AndroidMT), tandis que des éditeurs européens sont montés au créneau juridiquement: lire notre analyse détaillée dans cet article dédié à l’affaire européenne des résumés IA. L’enjeu: repenser le lien de confiance entre l’éditeur, la plateforme et l’utilisateur final à l’heure de la désintermédiation automatique.
Pour comprendre comment ce dispositif peut bouleverser l’ensemble de l’écosystème web, il faut en mesurer l’impact direct sur le trafic et la visibilité du contenu éditorial: ce sera l’objet de la section suivante.
Quels impacts pour les créateurs de contenu et médias? Vers une nouvelle chute du trafic?
Google Discover n’est plus seulement un moteur de recommandation: il est devenu en 2025, notamment en France, la première source de trafic pour de nombreux médias, générant jusqu’à 653 millions de clics mensuels contre 238 millions pour Google Search (source, details). Avec une croissance de +48,8% en un an, Discover domine l’actualité IA mobile. Mais cette domination accentue aussi la dépendance des éditeurs au bon vouloir de l’algorithme Google.
La nouveauté des résumés IA s’inscrit dans une tendance lourde: celle du zéro-clic. Après l’arrivée des snippets enrichis, puis des AI Overviews sur Search, on observe une part croissante de requêtes où l’utilisateur ne visite plus la source d’origine: en mai 2025, jusqu’à 69% des recherches d’actualités n’ont généré aucun clic externe (contre 56% un an plus tôt, Leptidigital). Les premiers retours suite à l’arrivée des résumés IA sont alarmants pour les éditeurs: certains témoignent de baisses brutales de trafic, jusqu’à -50% sur certains contenus à forte préférence mobile (SiecleDigital).
Les réactions s’enchaînent : blogueurs, consultants SEO, et grands groupes médias mêlent inquiétude (« Discover va-t-il détruire l’économie du contenu de qualité? « ), stratégies d’adaptation accélérée, et boycott ponctuel. Des experts SEO, tels que ceux cités dans Miss SEO Girl, parlent d’une « urgence à repenser la valeur ajoutée humaine, l’angle, l’émotion ou la donnée de première main ». D’autres invitent à relire la réflexion sur la désintermédiation générative décrite sur notre site. Il n’est plus question d’adapter sa stratégie SEO à la marge, mais bien de survivre dans un environnement post-clic.
Cette « fin du clic » n’est pas inéluctable: certains médias testent de nouveaux formats (audio, infographies), misant sur la fidélisation directe et la pluralité des contenus pour contourner partiellement la désintermédiation algorithmique. Mais le rapport de force semble, pour l’heure, basculer nettement du côté des grandes plateformes, bouleversant la chaîne de valeur du web éditorial classique.